« Jâai toujours aimĂ© les grands rĂ©cits dâaventure, surtout ceux oĂč les explorateurs
dĂ©couvrent un monde dont nul ne soupçonnait lâexistence. »
Don Hall, rĂ©alisateur dâAvalonia, lâĂ©trange voyage
Avalonia, lâĂtrange voyage raconte comment les Clade â une famille dâexplorateurs lĂ©gendaires â dĂ©couvrent un monde inexplorĂ© et peuplĂ© de crĂ©atures fantastiques.
Searcher Clade est un inventeur de gĂ©nie qui, Ă lâadolescence, a dĂ©couvert une source dâĂ©nergie vĂ©gĂ©tale rĂ©volutionnaire. Il a plus tard crĂ©Ă© une exploitation agricole prospĂšre pour cultiver, rĂ©colter et vendre sa production, en compagnie de son Ă©pouse et de son fils. Le pĂšre de Searcher, Jaeger, a dĂ©cidĂ© trĂšs jeune dâĂȘtre un explorateur lĂ©gendaire. Il a rĂ©ussi (une statue lui est mĂȘme dĂ©diĂ©e en ville) mais il a disparu lors dâune expĂ©dition et personne nâa plus entendu parler de lui depuis des dĂ©cennies. Le fils de Searcher, Ethan, est quant Ă lui un ado de 16 ans Ă©panoui, drĂŽle et plutĂŽt travailleur. Il aide Ă la ferme mais nâest pas sĂ»r de vouloir reprendre lâexploitation familiale. Les trois hommes de la famille sont trĂšs diffĂ©rents, ce qui est source de nombreuses disputes, mais ils ont aussi beaucoup plus de points communs quâils ne veulent bien lâadmettre.
Le pĂ©riple des Clade commence le jour oĂč la prĂ©sidente dâAvalonia, Callisto Mal, rend une visite surprise Ă Searcher et son Ă©pouse Meridian pour leur annoncer une mauvaise nouvelle : le pando â la plante rĂ©volutionnaire que Searcher a dĂ©couverte des annĂ©es auparavant â est en train de perdre de sa vitalitĂ©, ce qui fait peser un grave danger pour tous les habitants. Ils doivent remonter jusquâĂ sa source, sans mĂȘme savoir oĂč elle se trouve, pour assurer leur approvisionnement.
Leur voyage les mĂšne dans un monde dont personne ne soupçonnait lâexistence, empli dâune myriade de crĂ©atures inconnues, Ă©tranges, merveilleuses ou carrĂ©ment dangereuses. Ils seront accompagnĂ©s dans cette aventure par un blob espiĂšgle et Legend, leur chien Ă 3 pattes. Mais la plus grande dĂ©couverte de ce voyage fantastique concerne surtout la dynamique familiale. Elle seule est susceptible de bouleverser leurs relations et leur avenir !
Les dĂ©cors des films des studios dâanimation Walt Disney sont souvent fantastiques et imposants. Ils permettent de sâimmerger au sein dâunivers imaginaires, de Zootopie Ă San Fransokyo, dâArendelle aux jeux vidĂ©o en 8 bits, de Kumandra Ă Corona. Mais aucun nâest aussi spectaculaire que celui dâAvalonia, lâĂtrange voyage, un vaste monde souterrain plein de dangers et peuplĂ© de crĂ©atures bizarres.
« Cet univers extraordinaire est en fait une allĂ©gorie de notre planĂšte », explique Don Hall, lâun des rĂ©alisateurs du film. « LâidĂ©e de ce monde mâest venue en pensant Ă celui que je vais laisser Ă mes fils. En quoi est-il diffĂ©rent de celui dont jâai hĂ©ritĂ© de mon pĂšre ? »
Il sâest Ă©galement attachĂ© Ă montrer la relation entre les pĂšres et leurs fils, et leurs visions parfois diffĂ©rentes des choses. Il poursuit : « Je mâentends trĂšs bien avec mon pĂšre, qui est agriculteur. Je lâaidais sur des bricoles quand jâĂ©tais enfant. Et puis, Ă 14 ans, tout a changĂ©. Je devais faire des semis et tout un tas de choses de plus en plus compliquĂ©es qui ne mâintĂ©ressaient absolument pas. Ce nâĂ©tait pas mon truc. Tout sâest bien terminĂ© mais je nâai jamais oubliĂ© cette pĂ©riode dĂ©licate. Je me suis dit quâil serait intĂ©ressant dâexplorer les relations pĂšre-fils et la maniĂšre dont les attentes des parents â quâelles soient conscientes ou inconscientes â encombrent parfois les enfants. »
Qui Nguyen, scĂ©nariste et corĂ©alisateur du film, se souvient de ses premiĂšres conversations avec Don Hall au sujet de lâintrigue : « Jâai Ă©tĂ© trĂšs surpris quand il mâa dĂ©clarĂ© que le film parlait avant tout des relations pĂšre-fils. Jâai moi-mĂȘme deux enfants et je me suis dit que câĂ©tait exactement ce que je voulais faire. Câest un sujet que jâavais besoin et envie dâaborder. »
Et de poursuivre : « De ce point de vue-lĂ , on sâidentifiait parfaitement Ă Jaeger et Searcher. Les pĂšres sont partagĂ©s entre les ambitions quâils projettent sur leurs enfants et le simple fait dâĂȘtre papa. Câest quelque chose que comprennent probablement tous les artistes Disney et tous ceux qui ont de grandes ambitions. Une des choses qui nous motive avant tout, ce sont nos enfants, et on ne veut surtout pas perdre ça de vue. Câest ce que je vis, Don aussi, et câest ce que vivent nos personnages. »
Le producteur Roy Conli estime quant Ă lui que ce qui sous-tend lâintrigue du film repose sur la dynamique entre les personnages : « Les relations pĂšre-fils sont Ă la fois trĂšs belles et sources de tensions. Je viens du thĂ©Ăątre. Quand jâĂ©tais plus jeune, ma piĂšce prĂ©fĂ©rĂ©e Ă©tait « Mort dâun commis voyageur » qui traite de cette problĂ©matique universelle. Mon pĂšre et moi avions une relation extraordinaire. JusquâĂ mes 15 ans, je le voyais comme un superhĂ©ros⊠et puis je me suis rendu compte quâil nâĂ©tait pas infaillible. On sâest dĂ©chirĂ©s pendant une bonne dizaine dâannĂ©es mais on a heureusement rĂ©ussi Ă surmonter nos diffĂ©rences. CâĂ©tait un homme incroyable. Les pĂšres poussent leurs fils Ă se dĂ©passer et les fils finissent par rejeter leurs pĂšres, avant de se rĂ©concilier avec eux. »
« Je pense souvent que le pando a eu le mĂȘme impact sur Avalonia que lâavĂšnement de lâĂ©lectricitĂ© dans notre monde », reprend Roy Conli. « Il suffit de voir comment les choses ont Ă©voluĂ© en un demi-siĂšcle, entre 1880 et 1930, grĂące Ă lâĂ©lectricitĂ©. Quand les personnages dĂ©couvrent que le pando risque de disparaĂźtre, ça devient un moteur de lâintrigue qui va mener aux retrouvailles de Searcher et de son pĂšre Jaeger. »
Câest une comĂ©die pleine dâaction, dans lâesprit des pulps, ces magazines et romans de gare qui ont longtemps Ă©tĂ© populaires aux Etats-Unis. « Jâai toujours aimĂ© les grands rĂ©cits dâaventures, surtout ceux oĂč les explorateurs dĂ©couvrent un monde dont nul ne soupçonnait lâexistence », reprend Don Hall. « Les Ćuvres de la fin du XIXe et du dĂ©but du XXe siĂšcles â les Jules Verne, H.G. Wells, Sir Arthur Conan Doyle â ont dĂ©fini le genre. Au cinĂ©ma, KING KONG est une autre bonne rĂ©fĂ©rence. Je voulais que ce film rappelle cet Ăąge dâor. »
Les principaux personnages du film sont issus de trois gĂ©nĂ©rations dâune mĂȘme famille. Ils sont accompagnĂ©s de deux personnages fĂ©minins forts qui prennent en charge lâexpĂ©dition. « Il y a un baby-boomer, un millenial et un membre de la gĂ©nĂ©ration Z. Câest trĂšs amusant parce quâavec un peu de chance, ça permettra aux spectateurs de mieux comprendre ses parents, ses enfants et ses grands-parents » espĂšre Roy Conli.
Certes, les familles ont parfois des dĂ©saccords mais chaque rĂ©cit digne de ce nom a sa part de conflits. Ici, Searcher va devoir se rĂ©concilier avec son pĂšre, mais aussi avec son propre fils, ce qui le prend au dĂ©pourvu. Cependant, les producteurs voulaient montrer que leurs rapports sont moins tendus quâil y paraĂźt. « Les personnages Ă©taient animĂ© par des Ă©quipes diffĂ©rentes auxquelles nous avons demandĂ© de se mettre dâaccord sur les traits de caractĂšre ou les gestes quâils ont en commun » explique Justin Sklar. « Je pense par exemple Ă ce quâon appelait leur âinspiration nasale disproportionnĂ©eâ dans les moments de stress ou de colĂšre, ou un froncement spĂ©cifique en cas dâanxiĂ©tĂ©. Quelques scĂšnes montrent bien ces similitudes comportementales. »
Les personnages ont en revanche des teints trĂšs variĂ©s. Le directeur de la photo Brian Leach et son Ă©quipe, qui Ă©taient responsables de la partie Ă©clairages, devaient sâassurer que chaque couleur de peau Ă©tait cohĂ©rente dâune scĂšne Ă lâautre. Il dĂ©clare : « Nous avons passĂ© beaucoup de temps Ă finaliser le teint de chacun de nos hĂ©ros. Le mĂ©rite en revient principalement aux concepteurs visuels qui travaillaient en Ă©troite collaboration avec Mason Khoo, le responsable de lâĂ©clairage des personnages. Nous avons pris soin de ne pas trop Ă©clairer ceux qui avaient la peau plus mate et veillĂ© Ă ce que les diffĂ©rentes spĂ©cularitĂ©s ne se traduisent pas par des tons trop dĂ©lavĂ©s ou Ă©dulcorĂ©s. »
Jin Kim souligne que les tenues des personnages Ă©taient censĂ©es provenir dâune rĂ©gion spĂ©cifique, mĂȘme si aucune rĂ©gion ne les a vĂ©ritablement inspirĂ©es. « Les vĂȘtements avaloniens rappellent ceux des fermiers du monde entier, quâils vivent en Europe, en Asie, dans lâHimalaya ou aux Ătats-Unis. Ils sont trĂšs ordinaires mais nous leur avons ajoutĂ© une ceinture futuriste. »
Au sortir de la production de RAYA ET LE DERNIER DRAGON peuplĂ© de personnages plus rĂ©alistes, Don Hall avait envie de quelque chose de diffĂ©rent. « Jâadore la BD franco-belge », explique-t-il. « Dâun point de vue stylistique, câĂ©tait amusant dâincorporer ces influences Ă lâunivers Disney, ce qui nâavait encore jamais Ă©tĂ© fait. Ăa correspondait assez bien Ă lâidĂ©e de film dâaventure Ă sensation. Nous avons donc combinĂ© ces deux influences. »
Jin Kim, directeur artistique des personnages, explique que lâĂ©quipe a analysĂ© diffĂ©rentes BD, de « Gaston » Ă lâĆuvre de Didier Conrad : « Leur graphisme se caractĂ©rise par une abondance de courbes. Il nây a presque pas de lignes droites. Les personnages ont des nez ronds et des yeux ovales. Ces deux Ă©lĂ©ments ont influencĂ© la conception de nos hĂ©ros ».
Amy Smeed, lâune des directrices de lâanimation, ajoute que ses Ă©quipes se sont aussi inspirĂ© des classiques Disney de la fin des annĂ©es 1940 et du dĂ©but des annĂ©es 1950, comme LA BELLE AU BOIS DORMANT et PETER PAN. Il y a Ă©galement des allusions au moyen mĂ©trage « La LĂ©gende de la vallĂ©e endormie »(dans LE CRAPAUD ET LE MAITRE DâECOLE)et MELODIE COCKTAIL dont le style est souvent proche de la caricature, avec des silhouettes et des gestes trĂšs prononcĂ©s. Câest toujours lâun des objectifs en matiĂšre dâanimation : des silhouettes fortes et des formes plus allongĂ©es, en fonction du personnage. Dans Avalonia, lâĂtrange voyage,les poses sont un peu plus exagĂ©rĂ©es que dâhabitude. Ainsi allongĂ©es, elles permettent au public dâen profiter un peu plus longtemps.
Son confrĂšre Justin Sklar ajoute : « Le mouvement Ă©tait traitĂ© dâune maniĂšre particuliĂšre dans les annĂ©es 1940 : les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments nâĂ©taient pas vraiment connectĂ©s les uns aux autres. A lâĂ©poque, on se souciait moins de lâexactitude anatomique et davantage de la fluiditĂ© du mouvement Ă lâĂ©cran. »
SEARCHER CLADE est un membre estimĂ© dâAvalonia, car il a dĂ©couvert une source dâĂ©nergie vĂ©gĂ©tale rĂ©volutionnaire, le pando. Il sâoccupe du bon fonctionnement de lâusine qui fournit de lâĂ©nergie Ă toute la communautĂ©. Mais câest surtout un homme trĂšs attachĂ© Ă sa famille : il aime surprendre son Ă©pouse Meridian en la faisant soudain virevolter dans la cuisine et il ferait tout pour son fils Ethan. Il a travaillĂ© dur pour assurer une existence paisible aux siens. En revanche, quand il nâest plus dans son Ă©lĂ©ment, il perd confiance en lui. « Jâai de grands ados et un pĂšre qui devient vieux », explique Don Hall. « Je comprends donc parfaitement ce que ressent Searcher parce que jâen suis au mĂȘme stade que lui. »
Searcher a rĂ©ussi Ă sortir de lâombre de son pĂšre, un grand aventurier, et trouvĂ© sa propre voie (tous deux ont dâailleurs leur statue Ă Avalonia). « Searcher est pris entre la lĂ©gende envahissante du plus grand explorateur de tous les temps et de ce quâil a lui-mĂȘme crĂ©Ă©. Il sâest construit en opposition Ă son pĂšre quâil considĂšre comme un irresponsable », ajoute le rĂ©alisateur. « Il a tout fait pour ĂȘtre son contraire en faisant passer sa famille avant tout. »
« Je pense que Jake Gyllenhaal (la voix originale de Searcher) a parfaitement saisi les enjeux de cette histoire », dĂ©clare Don Hall. « Il y met beaucoup dâĂ©motion. Il a trĂšs rapidement cernĂ© le personnage et sâest facilement adaptĂ© aux circonstances. Si par exemple on lui disait quâun monstre gĂ©ant Ă tentacules le poursuivait, il faisait travailler son imagination et il nous proposait des choses trĂšs drĂŽles. Il a apportĂ© beaucoup dâhumour au personnage et les animateurs se sont inspirĂ©s de son interprĂ©tation. »
Jake Gyllenhaal confie : « Dans une famille, tout commence par la place quâon prend au sein du groupe, les responsabilitĂ©s qui sont les nĂŽtres et lâempathie dont on fait preuve. Par consĂ©quent, le microcosme familial affecte le macrocosme du monde extĂ©rieur. La façon dont on prend soin de ce qui nous entoure a son importance. On ne peut pas en faire abstraction. Il est indispensable de savoir Ă©couter. Pour moi, le film parle notamment des questions environnementales, de ce que nous faisons Ă la nature et, par consĂ©quent, de ce que nous nous faisons Ă nous-mĂȘmes. Parce quâau fond, je pense que la planĂšte survivra dâune maniĂšre ou dâune autre. Nous, en revanche, câest moins sĂ»r. »
Et de poursuivre : « Je pense quâen grandissant, on essaie pendant des annĂ©es de se dĂ©finir par opposition Ă sa famille, mĂȘme quand on lâadore. Nos parents se projettent sur nous et nous poussent dans une direction, parfois mĂȘme de maniĂšre inconsciente. Lâinconscient est toujours prĂ©sent, de maniĂšre sous-jacente, et câest ce qui mâa plu dans cette histoire. Parce quâAvalonia, indĂ©pendamment de toute sa complexitĂ© et sa singularitĂ©, raconte avant tout pourquoi il est essentiel de sortir de sa zone de confort â mĂȘme quand ça nous fait peur â si lâon veut vraiment comprendre les gens quâon aime le plus. »
Jin Kim explique : « Searcher Ă©tait initialement assez mince. Cependant, comme Jaeger est une force de la nature, on a choisi dâaccentuer la ressemblance entre le pĂšre et son fils. Ils ont Ă©galement le mĂȘme gros nez rond ». En revanche, Searcher est trĂšs indĂ©pendant et les animateurs se sont efforcĂ©s de montrer cela. « On a voulu souligner cette distinction », prĂ©cise Amy Smeed. « Câest un agriculteur trĂšs mĂ©ticuleux. Je ne dirais pas quâil est perfectionniste mais il veut que les choses fonctionnent correctement. Il fait trĂšs attention Ă lâendroit oĂč il met les pieds quand il est dans ses champs. »
JAEGER CLADE, le pĂšre de Searcher, rĂȘvait depuis longtemps de sâaventurer au-delĂ des montagnes qui entourent Avalonia. Cette idĂ©e a fini par devenir une vĂ©ritable obsession, mĂȘme quand une Ă©norme erreur lâa exilĂ© dans un monde Ă©trange, loin de sa famille. La seule chose qui lui importe Ă prĂ©sent est de transmettre quelque chose Ă ceux quâil aime. « Jaeger est un hĂ©ros de roman de gare par excellence, un de ces types en chemise dĂ©chirĂ©e qui, sur la couverture, se battent contre un alligator », explique Qui Nguyen. « Câest un personnage absolument fantastique. Mais je nâaimerais pas du tout avoir un pĂšre comme ça ! »
Et de poursuivre : « On voulait vraiment forcer le trait jusquâĂ la caricature. Pour lui donner vie, il nous fallait une lĂ©gende. Dennis Quaid a eu une carriĂšre extraordinaire et a aussi montĂ© un groupe dont il est le chanteur. Ce genre de personnalitĂ©, capable de fasciner les foules, câest Jaeger. Quand on faisait une sĂ©ance dâenregistrement avec Dennis, on en avait pour notre argent ! »
Dennis Quaid confie : « Il Ă©tait Ă©vident pour moi que câĂ©tait un type plus grand que nature. Il a des longs cheveux, de gros mollets, de gros biceps, deux flingues et des tablettes de chocolat. En fait, jâai simplement grossi certains traits de ma personnalitĂ©, et câĂ©tait trĂšs marrant. Il mâa fallu quelques sĂ©ances pour trouver le ton juste parce que je suis quelquâun de relativement plus discret ! Mes enfants vous diraient peut-ĂȘtre le contraire, remarquez. En tout cas, je me suis bien amusĂ©. »
Qui dit personnage caricatural dit accessoires caricaturaux. Michael Kaschalk, le directeur de lâanimation des effets visuels, dĂ©clare : « Quand Jaeger fait face Ă un obstacle dans le monde Ă©trange, il sort son lance-flammes. Sauf quâil sâagit dâun modĂšle dont les caractĂ©ristiques techniques ont Ă©tĂ© exagĂ©rĂ©es. Son rayon dâaction est important, mĂȘme quand Jaeger ne lâutilise que pour dĂ©sherber. On sâest aussi inspirĂ©s des romans « pulp » pour le dessin des flammes. On est partis de quelque chose dâhyperrĂ©aliste auquel on a donnĂ© un cĂŽtĂ© BD dans un second temps, sans que ça dĂ©tourne non plus lâattention des spectateurs. »
Câest typiquement le genre dâobjet que ne supporte pas Searcher quand il retrouve son pĂšre dans le monde Ă©trange, permettant ainsi aux producteurs dâaccentuer le conflit des gĂ©nĂ©rations. « En gros, on a trois gĂ©nĂ©rations dâune mĂȘme famille qui ne sâentendent pas, ce dont nous avons tous fait lâexpĂ©rience », explique Qui Nguyen. « Mais on voulait aussi montrer ce qui les unit. AprĂšs tout, est-ce quâon nâest pas tous destinĂ©s Ă ĂȘtre dâabord comme Ethan, puis comme Searcher et, un jour, comme Jaeger ? »
Ce conflit de gĂ©nĂ©ration Ă©tait soulignĂ© Ă chaque Ă©tape du tournage. Le responsable des dĂ©cors Scott Beattie et son Ă©quipe ont ainsi utilisĂ© la mise en scĂšne, les focales et les angles de camĂ©ras pour souligner cette tension ou les rĂ©conciliations : « Il nous arrivait de ne pas mettre les deux personnages dans le mĂȘme plan pour accentuer leur distance, ou de les placer loin lâun de lâautre dans un plan plus large. Ă lâinverse, on utilisait des focales longues qui donnaient une impression de rapprochement, et cela mĂȘme quand ils ne bougeaient pas. Les spectateurs ne le remarqueront pas forcĂ©ment, mais le sentiront de façon subliminale. »
Pour Dennis Quaid, le film met en avant lâacceptation des autres pour ce quâils sont : « Je pense que le film parle vraiment de lâimportance dâĂȘtre fidĂšle Ă soi-mĂȘme et dâassumer ce choix. Câest ce qui unit ces trois gĂ©nĂ©rations qui sont toutes authentiques Ă leur maniĂšre et qui sâacceptant telles quâelles sont. »
ETHAN CLADE, 16 ans, est lâado dans toute sa splendeur : il lĂšve les yeux au ciel quand ses parents sâembrassent, sâillumine quand ses amis sont lĂ et perd tous ses moyens quand le garçon quâil aime, Diazo, est dans les parages. Il rĂȘve de vivre des aventures extraordinaires, comme le grand-pĂšre quâil nâa jamais connu. Quand son pĂšre part pour une mission cruciale Ă bord du dirigeable Venture, Ethan embarque clandestinement. Pour Roy Conli, tous deux ont de bons rapports mais des idĂ©es trĂšs diffĂ©rentes sur lâavenir : « Ethan est proche de son pĂšre. Il sait que Searcher lâaime mais la vie Ă la ferme ne lui suffit pas. »
Jaboukie Young-White (la voix originale dâEthan) vient du stand-up. « On aime que les acteurs improvisent et Jaboukie sait faire ça les yeux fermĂ©s », explique Don Hall. « Il a une joie toute juvĂ©nile qui rend le personnage trĂšs chaleureux, ce qui nâest pas Ă©vident quand on interprĂšte un adolescent ! »
Lâacteur a Ă©tĂ© sĂ©duit autant par le personnage que par le thĂšme dâAvalonia, lâĂtrange voyage : « Pour moi, lâenvie de tracer sa propre voie, de sâaccepter tel quâon est et les autres tels quâils sont, ça reste intemporel. Je trouve ça dâautant plus pertinent que lâon vit dans une pĂ©riode oĂč les gens ont de plus en plus de facilitĂ©s Ă ĂȘtre eux-mĂȘmes. Il y a, malgrĂ© tout, de plus en plus de tolĂ©rance. Je pense donc que cette thĂ©matique sera toujours dâactualitĂ©. »
Les animateurs se sont inspirĂ©s de lâacteur et dâautres personnes dans leur travail de crĂ©ation. « Ethan est un adolescent. Jâai une fille de son Ăąge Ă la maison, que jâai lâhabitude dâobserver avec ses amies. Ce que je constate, câest quâelle est trĂšs diffĂ©rente dâelles, de la mĂȘme maniĂšre quâEthan est un garçon pas comme les autres » dĂ©clare Amy Smeed. « Les animateurs sont de bons observateurs du quotidien, que ce soit au parc, au supermarchĂ© ou au restaurant. »
MERIDIAN CLADE pilote avec talent lâavion dâĂ©pandage qui permet aux cultures du pando de prospĂ©rer. Câest le genre de personne qui voit toujours le bon cĂŽtĂ© des choses et elle aime profondĂ©ment les siens. « Meridian adore voler et, comme son mari, sa vie tourne autour de la ferme, qui est leur gagne-pain », explique la scĂ©nariste en chef Lissa Treiman. PosĂ©e, observatrice et trĂšs cool, Meridian rejoint in extremis lâexpĂ©dition de son mari quand elle sâaperçoit que son fils sâest embarquĂ© clandestinement Ă bord. Elle apportera une aide prĂ©cieuse Ă cette mission. « Elle est essentielle Ă lâintrigue », remarque le scĂ©nariste David G. Derrick Jr. « Elle va non seulement piloter le Venture mais aussi aider ces trois gĂ©nĂ©rations dâhommes Ă se rĂ©concilier. »
Ces circonstances exceptionnelles tĂ©moignent de lâassurance et des compĂ©tences du personnage, des qualitĂ©s que Jamie Sparer Roberts a dĂ©celĂ©es chez Gabrielle Union, la voix de Meridian dans la version originale : « Gabrielle a de la force, du courage, de lâhumour, de lâintelligence et de lâexpĂ©rience Ă revendre. Sa voix douce est empreinte dâune grande assurance. Elle peut dire en dix mots ce que la plupart des gens mettent dix phrases Ă exprimer. »
Gabrielle Union aime ce personnage optimiste : « Ce qui me plaisait le plus chez cette femme, câest quâelle est heureuse et fiĂšre de constater que chacun des membres de sa petite famille a son univers. Elle pousse son fils Ă tracer sa propre voie. Jâaime ça. »
Justin Sklar trouve que Meridian â une pilote, une Ă©pouse et une mĂšre â est une femme admirable : « Câest probablement la personne la plus Ă©quilibrĂ©e du groupe. Elle nâa peur de rien et surtout pas dâentrer par le hublot du Venture pour en reprendre le contrĂŽle. Elle se connaĂźt, elle connaĂźt les autres et elle a envie de les voir sâĂ©panouir. Ăa se sent notamment dans ses interactions avec Ethan qui se pose non seulement plein de questions sur son avenir mais aussi sur le jeune homme quâil est. Elle lui suggĂšre tout simplement quâil gagnerait Ă analyser ce quâil ressent. Elle lâĂ©coute et le guide, mais elle nâest pas lĂ pour faire les choses Ă sa place. »
Les rĂ©alisateurs du film, tout comme les acteurs, avaient conscience du lien entre lâintrigue, son dĂ©cor et le monde rĂ©el. Pour Gabrielle Union : « La beautĂ© de cet univers souterrain rappelle celle du monde qui nous entoure et le plaisir de dĂ©couvrir dâautres cultures, dâautres maniĂšres de prendre soin les uns des autres, de prĂ©server lâenvironnement, de respecter les capacitĂ©s de chacun et dâimaginer diffĂ©rentes maniĂšres de travailler en Ă©quipe. Tous les personnages sortent vraiment de leur zone de confort. Ils doivent apprendre Ă travailler ensemble, non seulement pour survivre mais aussi pour sauver leur communautĂ©. »
CALLISTO MAL, la prĂ©sidente dâAvalonia, frĂ©quente les Clade depuis longtemps. Elle a autrefois fait partie de lâexpĂ©dition de Jaeger mais a finalement choisi une autre voie. Bien dĂ©cidĂ©e Ă comprendre ce qui assĂšche le pando, elle organise une mission vers un monde inconnu. « Câest une femme qui sait commander », reprend Lissa Treiman. « Elle a suffisamment dâassurance pour prendre des dĂ©cisions sans pour autant foncer tĂȘte baissĂ©e. De plus, elle trĂšs empathique. » Les rĂ©alisateurs voulaient que le personnage soit aussi courageux et fort que Jaeger, mais moins Ă©gocentrĂ©. « Leurs personnalitĂ©s sont diamĂ©tralement opposĂ©es », dĂ©clare Qui Nguyen. « Elle se fiche de ce quâelle va lĂ©guer Ă la postĂ©ritĂ©. Ce qui compte avant tout pour elle, ce sont les habitants dâAvalonia. »
Lucy Liu, la voix originale du personnage, confie : « Callisto est trĂšs courageuse mais câest aussi quelquâun de trĂšs rĂ©flĂ©chi. Ce que jâaime chez elle, câest quâelle pense toujours aux autres. Si elle nâĂ©tait pas devenue prĂ©sidente, elle aurait peut-ĂȘtre Ă©tĂ©, elle aussi, une aventuriĂšre. Elle nâa pas la langue dans sa poche et sait se montrer trĂšs chaleureuse. Sa mission est de sauver son peuple. Câest pour cela quâelle se lance dans cette aventure. »
Ce cĂŽtĂ© aventurier a Ă©galement inspirĂ© les animateurs. « Câest une ancienne exploratrice. Elle faisait partie de lâexpĂ©dition initiale avec Jaeger et Searcher. Câest une femme de pouvoir qui nâa peur de rien. Elle est douĂ©e et aime la nature » rappelle Justin Sklar. « Elle a fini par faire de la politique et ĂȘtre Ă©lue prĂ©sidente des habitants dâAvalonia. En termes dâanimation, on voulait combiner ces deux facettes, lâintelligence et la diplomatie, avec ce petit cĂŽtĂ© baroudeur. Elle est probablement plus Ă lâaise sur le Venture quâen rĂ©union. »
Lucy Liu a Ă©galement aimĂ© le message dâAvalonia, lâĂtrange voyage : « Je pense que le film parle avant tout de lâimportance de prendre soin de la planĂšte et de se responsabiliser. Au fond, mon personnage part Ă lâaventure parce quâelle veut sauver leur monde. Je pense, comme elle, quâil est essentiel de veiller les uns sur les autres. »
SPLAT est une crĂ©ature bleue, informe et molle. Originaire du monde inexplorĂ©, elle se lie dâamitiĂ© avec Ethan et sert de guide Ă la famille Clade dans cette mystĂ©rieuse contrĂ©e souterraine. Pour cette crĂ©ature sans visage qui ne manque pas de personnalitĂ©, les rĂ©alisateurs ont dĂ» trouver le moyen de lui permettre dâexprimer des Ă©motions. « Tout est une question de timing et de posture, un peu avec comme une marionnette », explique Amy Smeed, responsable de lâanimation.
Pour animer le personnage, il a fallu le modĂ©liser en trois dimensions. Keith Wilson, responsable de lâanimation technique, raconte : « Splat a sept tentacules qui lui servent de jambes voire de mains. CâĂ©tait stimulant pour les artistes de dĂ©composer les diffĂ©rents membres du personnage. Ils devaient trouver le moyen de crĂ©er un systĂšme dâanimation intuitif oĂč chaque membre serait hyper extensible et capable dâaccomplir plein de choses. »
Et de poursuivre : « La rĂ©action de Splat Ă la lumiĂšre a aussi engendrĂ© de nombreux dĂ©fis artistiques. Il rĂ©pondait bien Ă lâaberration chromatique ou la distorsion des couleurs que lâon observe quand on regarde par exemple une photo prise au microscope. Les silhouettes ont alors ce contour arc-en-ciel. On aimait aussi lâidĂ©e que Splat puisse avoir un volume et une certaine densitĂ©Â : il nâest pas complĂštement transparent. Il brille de lâintĂ©rieur, Ă lâinstar de lâaberration chromatique qui entoure sa silhouette. »
Pour les plans de Splat et des crĂ©atures du mĂȘme type, les rĂ©alisateurs ont choisi dâaller plus loin afin que les personnages soient parfaitement visibles. « Au dĂ©but, on faisait beaucoup de plans larges pour que les animateurs aient la place dâanimer les crĂ©atures » indique Scott Beattie. « Mais quand on est passĂ© Ă la finalisation des dĂ©cors, on ne savait toujours pas si Splat allait se dĂ©placer et quelles seraient ses Ă©motions puisquâil nâa pas de visage. Les animateurs ont fait des merveilles. »
LEGEND est le chien Ă trois pattes de la famille. PerpĂ©tuellement joyeux, il adore se frotter aux situations dangereuses, sans vraiment rĂ©flĂ©chir. Quand Ethan dĂ©cide de prendre part Ă la mission sans prĂ©venir personne, son fidĂšle compagnon lâaccompagne naturellement, toujours dĂ©sireux de plaire Ă son humain de compagnie. Cependant, sa prĂ©sence et son habitude instinctive de saluer joyeusement chaque Ă©tranger risque de causer plus de mal que de bien.
Don Hall attribue lâidĂ©e du personnage Ă Burny Mattinson, un dessinateur de story-boards qui travaille chez Disney Animation depuis 1953. « Il nâarrĂȘtait pas de me dire quâil manquait un chien dans ce film », explique-t-il. « On associe ces animaux Ă la famille et Avalonia, lâĂtrange voyageest avant tout un grand film familial. Jâai dĂ©cidĂ© de lâappeler Legend, parce que câest le surnom quâon donne ici Ă Burny. » Burny Mattinson a obtenu le titre officiel de lĂ©gende Disney en 2008.
Le monde mystĂ©rieux dans lequel les Clades sâaventurent pour trouver ce qui menace la production du pando nâest pas sans danger. Lâaccueil que leur rĂ©servent des crĂ©atures sans bras et sans visage nâest pas des plus chaleureux. Qui Nguyen explique quâil fallait absolument sâassurer que cet univers nâavait pas dĂ©jĂ Ă©tĂ© vu cent fois : « La question Ă©tait de savoir comment faire pour rendre ces personnages vraiment extraordinaires et ne pas finir avec des crĂ©atures quâon pourrait voir dans nâimporte quel film. Quâest-ce qui fait dâelles des personnages Disney ? »
Il poursuit : « Il fallait donc proposer quelque chose de diffĂ©rent. On a pris la dĂ©cision quâelles nâauraient pas de globes oculaires, pas de nez et pas de bouche. OubliĂ©s donc les grands yeux et les sourires Disney ! On est revenus aux balais de FANTASIA et au tapis magique dâALADDIN. Comment humanise-t-on une crĂ©ature sans visage ? »
« On voulait faire la distinction entre lâanimation des humains et celle des crĂ©atures » ajoute Justin Sklar. « Alors que les premiers passent en gros de pose en pose, les secondes sont en perpĂ©tuel mouvement, trĂšs fluides, dĂ©nuĂ©es dâangles et de squelette. »
Au regard de son titre, Avalonia, lâĂtrange voyage se devait dâĂȘtre extraordinaire. Câest pourquoi les artistes des studios dâanimation Walt Disney avaient bien lâintention de crĂ©er un univers aussi surprenant quâimpressionnant. Ils ont commencĂ© avec les pulps, des magazines ou romans de gare emplis dâaction, de rebondissements et de sensations fortes, dont lâĂąge dâor a durĂ© soixante ans, de 1896 Ă la fin des annĂ©es 1950.
Larry Wu, le directeur artistique de la partie dĂ©cors, prĂ©cise que lâĂ©quipe sâest concentrĂ©e sur les magazines des annĂ©es 1930 et 1940 : « On en a consultĂ© plusieurs, notamment les « Doc Savage ». Sur les couvertures rĂ©alisĂ©es par de grands illustrateurs de lâĂ©poque, il y avait toujours une source lumineuse principale et un halo, qui semblaient prĂ©sager quelque chose de terrible. »
Justin Cram, le chef dĂ©corateur adjoint, poursuit : « Toute lâĂ©quipe sâest amusĂ©e Ă concevoir les diffĂ©rents sites du monde Ă©trange, en sâinspirant des couvertures de ces publications qui imaginaient un avenir trĂšs diffĂ©rent de ce que lâon connaĂźt, avec des vaisseaux spatiaux, des extraterrestres, voire des crĂ©atures prĂ©historiques. CâĂ©tait un excellent point de dĂ©part. »
Tout comme dans les romans « pulp » extrĂȘmement populaires il y a un siĂšcle, rien nâest impossible dans Avalonia, lâĂtrange voyage. Quand lâhistoire se dĂ©roule-t-elle ? Lissa Treiman, lâune des scĂ©naristes en chef, confie : « Ce monde imaginaire ne ressemble Ă aucune pĂ©riode prĂ©cise. On lui a juste donnĂ© un « plafond technologique ». Les radios existent mais pas les tĂ©lĂ©phones portables ou les ordinateurs ; on a des dirigeables mais pas de satellites. Avalonia est entourĂ© de montagnes au-delĂ desquelles personne ne sâest jamais aventurĂ©. »
La ville dâAvalonia, la ferme de la famille Clade et le monde Ă©trange ont chacun un style visuel et une palette chromatique distincts. Sans oublier une bibliothĂšque numĂ©rique spĂ©cifique, dans laquelle lâĂ©quipe artistique puisait des Ă©lĂ©ments pour crĂ©er des dĂ©cors dâune grande richesse. « Ăa nous a permis de dĂ©composer chaque monde et dâidentifier toutes les petites choses dont on aurait besoin pour les besoins de lâintrigue », explique Sean Jenkins, le responsable du service.
Habituellement, ces bibliothĂšques sont constituĂ©es de plantes et dâarbres du monde rĂ©el. Mais parce que lâunivers dâAvalonia, lâĂtrange voyage est unique, il fallait inventer chaque lampadaire, chaque clĂŽture, chaque Ă©lĂ©ment de la faune ou de la flore.
LA CITE DâAVALONIA a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e en privilĂ©giant les tons chauds comme le blanc, lâorange et le rouge. « Nous voulions susciter un sentiment dâutopie, de tendresse et de nostalgie. Nous voulions souligner le fait que le pando est une culture merveilleuse et unanimement apprĂ©ciĂ©e », explique Justin Cram. Il existe deux versions dâAvalonia : avant et aprĂšs lâarrivĂ©e du pando. « On montre comment la ville est passĂ©e de construction Ă un Ă©tage Ă des immeubles de 100 Ă©tages », ajoute le dĂ©corateur Merhrdad Isvandi.
Les spectateurs attentifs remarqueront que le pando est complĂštement intĂ©grĂ© Ă la ville, dont il alimente les Ă©quipements, depuis les lampadaires jusquâaux vĂ©hicules. Larry Wu estime quâAvalonia donne un bon aperçu de ce qui va suivre. « On voulait Ă©voquer un endroit nostalgique oĂč on peut se rĂ©fugier quand on veut se sentir bien et passer un bon moment, un lieu tout doux et chaud. »
Pour les réalisateurs, il était essentiel de faire la distinction entre Avalonia et le monde étrange. Pour cela, Scott Beattie a notamment travaillé sur les angles de prises de vue et les focales : « Pour les scÚnes qui se déroulent dans la ville et à la ferme, les séquences sont généralement plus statiques et plus linéaires ».
LA FERME DES CLADE est lâendroit oĂč prĂ©dominent les tons froids, comme les verts et les bleus luxuriants, prĂ©dominent. « Jâai regardĂ© de vieux tirages Kodachrome des annĂ©es 1930 & 1940 et je me suis efforcĂ© de faire naĂźtre une Ă©motion qui reflĂšte les liens trĂšs forts qui unissent Searcher, Ethan et Meridian », explique Justin Cram. « Nous voulions que ces dĂ©cors aient un cĂŽtĂ© intemporel et quâils Ă©voquent vraiment lâidĂ©e du foyer familial. »
Don Hall, qui a grandi dans une ferme de lâIowa, connaissait parfaitement cet univers : « Chaque fois que jây retourne, je suis frappĂ© de voir Ă quel point lâhorizon sâĂ©tend Ă perte de vue. Le coin de lâIowa oĂč je suis nĂ©, dans le sud-ouest de lâĂtat, est assez vallonnĂ©. Tout semble vaste et trĂšs vert. Il y a beaucoup de champs de maĂŻs et de soja, et une sorte de gĂ©omĂ©trie dans le paysage. Je me suis dit que ce serait intĂ©ressant de transposer ça dans le film. »
Comme la ferme est la grande passion de Searcher, lâĂ©quipe artistique a cherchĂ© Ă souligner sa vision enchanteresse du travail agricole. Justin Cram dĂ©clare : « La lumiĂšre du soleil permettait vraiment de mettre en valeur les silhouettes. On a aussi beaucoup jouĂ© sur les diffĂ©rentes heures de la journĂ©e. Ce lien avec la nature Ă©tait vraiment important, surtout pour Searcher, parce quâAvalonia reprĂ©sente tout son univers. »
Les extĂ©rieurs, inspirĂ©s en partie par le travail de Hayao Miyazaki, sont empreints de nostalgie. « La ferme elle-mĂȘme est charmante, rustique et pittoresque » reprend Larry Wu. « Elle est confortable et montre tout lâamour de cette famille. Avalonia et la ferme ont des niveaux normaux de couleurs et de saturation. Dans le monde Ă©trange, en revanche, on a poussĂ© la saturation et utilisĂ© une palette chromatique diffĂ©rente. »
LE VENTURE est le dirigeable qui emporte Callisto Mal et la famille Clade vers le monde Ă©trange. Long dâune soixantaine de mĂštres, il ne passe pas inaperçu dans la ferme de Searcher. Ă lâinverse, dans le monde Ă©trange, il paraĂźt minuscule !
LâĂ©clairage du Venture est Ă la fois interne et externe. Brian Leach prĂ©cise : « On a passĂ© beaucoup de temps Ă dĂ©finir lâemplacement des sources lumineuses pour que les animateurs puissent les intĂ©grer dans leur travail. Quand on dĂ©couvre le monde Ă©trange, seules les lumiĂšres extĂ©rieures permettent de lâentrevoir dans les tĂ©nĂšbres. Pour faire comme dans les films, on ajoutait un petit effet de diffraction, avec des halos lumineux. Ăa nous a aussi permis de varier les focales, de maniĂšre Ă diffĂ©rencier le monde supĂ©rieur, caractĂ©risĂ© par des optiques sphĂ©riques, et le monde souterrain, avec des optiques anamorphiques. »
Ă la fin du voyage, lâĂ©quipage au grand complet a enfin lâoccasion dâobserver lâobjectif de la mission. « Ils aperçoivent les racines du pando, dont le beau vert luminescent montre lâĂ©nergie qui remonte Ă la surface » explique Michael Kaschalk. « Ils sont Ă la fois admiratifs, parce quâils nâont jamais vu cela, et apaisĂ©s parce que le rythme auquel le pando sâĂ©coule suscite un sentiment de sĂ©rĂ©nitĂ©. »
LE MONDE ĂTRANGE est un univers cachĂ© qui nâa rien de familier. Une vraie volontĂ© de la part des Ă©quipes dâanimation Disney. Mehrdad Isvandi dĂ©clare : « Quand on voit une jungle luxuriante, on se sent apaisĂ© parce que notre cerveau sait que le vert est synonyme de calme. Ă lâinverse, dans le monde Ă©trange, ce quâon prend pour un arbre nâen est pas forcĂ©ment un. La jungle est de toutes les couleurs, Ă lâexception du vert. Par consĂ©quent, notre cerveau ne sait pas ce quâil doit ressentir. On avait envie de crĂ©er un monde Ă©thĂ©rĂ© dans lequel les spectateurs pourraient se repĂ©rer sans pour autant que sa beautĂ© ne vienne altĂ©rer le bon dĂ©roulement de lâintrigue. »
Pour le monde dont personne ne soupçonnait lâexistence, les tons froids de la ferme sont utilisĂ©s avec parcimonie. « Quand on arrive dans cet univers Ă©trange, il nây a aucune vĂ©gĂ©tation exceptĂ©e le pando », reprend Merhrdad Isvandi. « Le vert Ă©tait uniquement destinĂ© au pando. Nous avons aussi choisi une autre couleur que le bleu pour le ciel, ce qui nous a obligĂ©s Ă trouver dâautres tons pour embellir le paysage. Nous avons pris beaucoup de plaisir Ă relever ce dĂ©fi tout au long du tournage. »
Steve Goldberg, le responsable des effets visuels, prĂ©cise que cet univers est composĂ© de diffĂ©rentes zones allant de prairies Ă des grottes sombres. Le cĂŽtĂ© fantastique Ă©tait synonyme de libertĂ© artistique. Il confie : « LâĂ©quipe artistique a pu tenter diffĂ©rentes choses et proposer des idĂ©es. Quand on travaillait sur les Ă©lĂ©ments du dĂ©cor, les plantes, lâapparence du sol, elle venait nous faire des propositions graphiques. Chacun pouvait ainsi y trouver son compte, et je pense que le monde Ă©trange a gagnĂ© au change. »
Au fur et Ă mesure que les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments commençaient Ă prendre forme, les rĂ©alisateurs se sont dit quâil fallait envisager les choses diffĂ©remment. Ce qui ressemblait Ă des plantes pouvait soudain sâenvoler, ce qui se dĂ©plaçait comme un animal primitif pouvait sâenraciner. Certains Ă©lĂ©ments devenaient mĂȘme des personnages Ă part entiĂšre. Steve Goldberg dĂ©clare : « La taille de la faune et de la flore impliquait dâaller encore plus loin. Ce qui aurait normalement Ă©tĂ© confiĂ© au service des effets visuels Ă©tait ici intĂ©grĂ© Ă tous les stades de la conception des crĂ©atures. »
Les paysages et les crĂ©atures du monde Ă©trange sont si bizarres et saisissants que les producteurs ont dĂ» veiller Ă ce quâils ne prennent pas le pas sur les personnages. « Quand on sâapercevait que, sur un plan donnĂ©, on sâextasiait sur la beautĂ© de cet univers au point quâil nous dĂ©tournait de ce que vivaient nos hĂ©ros, on faisait marche arriĂšre » reconnaĂźt Justin Cram. « Le plus important reste les relations entre les personnages. Mais il y a des moments oĂč ils sont Ă©poustouflĂ©s par la beautĂ© des lieux et câest lĂ quâon peut vraiment montrer cet environnement dans toute sa splendeur. »
La jungle venteuse rose vif oĂč lâĂ©quipage sâĂ©crase Ă bord du Venture, la mer brĂ»lante, la forĂȘt bleue oĂč les arbres sâilluminent au passage des personnages, le dĂ©sert dâambre⊠sont quelques-uns des sites du monde Ă©trange. Outre les plantes aux reflux gastriques et celles qui dansent, on y trouve des espĂšces bioluminescentes et dâautres que les rĂ©alisateurs qualifiaient de « flore aux grands yeux ». Et cela, sans compter les espĂšces herbeuses !
Scott Beattie ajoute que son Ă©quipe avait plus dâun tour dans son sac pour accentuer lâĂ©trangetĂ© des lieux : « Les dĂ©cors Ă©taient conçus de telle maniĂšre quâon utilisait des focales plus larges, en variant manuellement la distorsion. Quand on voulait rendre telle ou telle chose encore plus Ă©trange, voire gĂȘnante, on forçait sur la distorsion ou on modifiait la composition du plan. Bien entendu, lâintrigue motivait chaque dĂ©cision. »
Pour la musique, les rĂ©alisateurs cherchaient un compositeur capable de proposer une nouvelle palette sonore Ă©voquant Ă la fois les liens trĂšs forts entre les personnages et le caractĂšre extraordinaire du monde Ă©trange. Câest ainsi quâils ont fait appel Ă Henry Jackman. « De notre point de vue, Henry faisait partie de lâĂ©quipe des scĂ©naristes » explique Roy Conli. « Il sait parfaitement accompagner la structure Ă©motionnelle de chaque scĂšne. Sa musique met en valeur chaque Ă©lĂ©ment. Ce quâil a crĂ©Ă© pour Avalonia, lâĂtrange voyage est aussi beau, radical et homĂ©rique que le film lui-mĂȘme. »
Henry Jackman se sentait prĂȘt Ă assumer cette mission titanesque : « Je suis toujours ouvert aux propositions inhabituelles, comme cette partition pour orchestre symphonique. Rien quâen lisant le scĂ©nario, jâai Ă©tĂ© emportĂ© par cette grande aventure dans un monde visuellement spectaculaire et empreint de poĂ©sie. »
Cette partition intĂšgre cependant dâautres nuances quand les spectateurs dĂ©couvrent la famille Clade. Le compositeur confie : « Au tout dĂ©but du film, lâambiance musicale sâaccorde peu avec un orchestre symphonique. Jâai donc pensĂ© Ă des dulcimers et des guitares, avec un peu dâĂ©lectronique, suffisamment pour Ă©voquer ce monde Ă la croisĂ©e de lâagriculture et de la technologie. »
Et de poursuivre : « Une fois quâils sont Ă bord du dirigeable et quâils pĂ©nĂštrent dans le monde Ă©trange, on passe Ă lâorchestre symphonique. Au lieu dâavoir recours Ă des Ă©lĂ©ments non orchestraux pour dĂ©crire cet univers, le mystĂšre tient davantage du langage mĂ©lodique. Il traduit le cĂŽtĂ© Ă©trange des lieux. Quant Ă la suite musicale, jâai fait un essai avec des harmonies un peu exotiques pour renforcer la notion dâĂ©trange voyage. Cela procure un cĂŽtĂ© un peu inquiĂ©tant. On a lâimpression de sâenfoncer dans un nouveau monde. »
Pour ajouter au mystĂšre, Henry Jackman a fait appel Ă des choristes dont il a retravaillĂ© la contribution. « Je voulais trĂšs lĂ©gĂšrement en Ă©toffer le son. Le mĂ©lange de vraie chorale et de tonalitĂ©s Ă©lectroniques nâest donc pas complĂštement artificiel. Ăa se rapproche un peu du concept de rĂ©alitĂ© augmentĂ©e ! Il y a quelques passages oĂč un synthĂ© double la fin des cordes, mais cela sans jamais les dominer. »
Le compositeur est convaincu quâune partition sert avant tout Ă unifier les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments du rĂ©cit et Ă clarifier les choses : « PlutĂŽt que dâĂ©crire un thĂšme spĂ©cifique Ă lâun des personnages, il me semble plus utile dâen avoir un sur lâaudace et lâaventure et un autre sur lâidĂ©alisme et le respect de lâenvironnement. Ce sont deux façons de voir le monde quâon peut utiliser de diffĂ©rentes maniĂšres au fur et Ă mesure que lâintrigue progresse. »
Le seul thĂšme Ă©crit pour lâun des personnages sâintĂšgre parfaitement dans celui du monde quâil habite. Henry Jackman confie : « Le thĂšme musical de Splat ne ressemble pas du tout Ă celui du monde Ă©trange mais ils partagent le mĂȘme ADN. Jâai pris les cinq premiĂšres notes de ma suite dont jâai modifiĂ© la grammaire, la syntaxe et lâorchestration. Je suis persuadĂ© quâĂ un niveau subliminal, les spectateurs comprendront que les deux sont liĂ©s et que câest ce qui assure la cohĂ©rence de lâensemble. »
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